La Commission d’examen des pratiques commerciales,
Vu la lettre enregistrée le 06 octobre 2006 sous le numéro 06-021, par laquelle le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sollicite son avis sur les pratiques suivies dans les relations commerciales entre assureurs et carrossiers réparateurs et d’émettre les recommandations sur un code de bonne conduite dans ce secteur en précisant les points essentiels qu’il pourrait comporter ;
Vu l’article L 440-1 du code de commerce ;
Vu le décret n° 2001-1370 du 31 décembre 2001 portant organisation de la Commission d’examen des pratiques commerciales, modifié par le décret n° 2002-1370 du 21 novembre 2002 ;
Vu le projet de charte entre les assureurs et les carrossiers réparateurs ci-joint ;
Le rapporteur entendu lors de ses séances des 14 juin, 25 octobre 2007 et 7 février 2008 ;
Adopte l’avis suivant :
I Sur l’objet de la saisine
Par lettre du 5 octobre 2006, la CEPC était saisie par le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes afin de :
- "formuler un avis sur les pratiques concernant les relations commerciales entre assureurs et carrossiers réparateurs,
- émettre les recommandations sur un code de bonne conduite dans ce secteur dont elle pourrait préciser les points essentiels qu’il pourrait comporter."
A la suite de tensions qui s’étaient fait jour en 2004 entre les carrossiers et les assureurs, le Ministre des Finances a fait saisir la CEPC afin d’examiner les pratiques commerciales de ces professions.
II Sur l’état du marché et la qualification des pratiques
Les relations tendues observées entre réparateurs et assureurs s’expliquent par l’état du marché (A) qui a suscité le développement de pratiques qui accentuent la pression économique pesant sur les réparateurs (B).
A) Etat du marché
Les carrossiers sont organisés en entreprises dont la taille et la structuration sont fort diverses. Des entreprises de quelques salariés avec une grande difficulté à mettre en place une gestion de leurs coûts et pour lesquels les nouveaux investissements sont impossibles coexistent avec de grandes entreprises très bien gérées pour lesquelles la carrosserie ne constitue qu’une branche d’activité associée à la vente de véhicules au travers d’une concession. 70% des carrossiers sont agréés parmi lesquels 29% sont indépendants, 18% appartiennent à un réseau de constructeur automobile et 23% appartiennent à un réseau de carrosserie qui fédère des indépendants.
La profession est représentée par trois syndicats (CNPA, GNCR, FNAA) qui couvrent assez bien les différentes composantes du métier.
Les assureurs automobiles sont soit des sociétés anonymes (AXA), soit des Mutuelles (MAIF, MAAF, MACIF, MATMUT). Les assureurs SA et les mutuelles avec intermédiaires sont représentées par la FFSA ; d’importantes mutuelles historiques sans intermédiaires sont représentées par le GEMA.
Les représentants des trois syndicats de carrossiers, des assureurs et leurs organes représentatifs (FFSA, GEMA) ont été consultés par le rapporteur.
Il a également rencontré des représentants des assureurs dont les parts du marché auto s’établissent comme suit : AXA (15%), MAIF (10%), MAAF (23%), MACIF (15%), MATMUT (7%).
B) Qualification des pratiques
Selon le rapporteur, les pratiques relevées peuvent être qualifiées de la façon suivante :
- l’orientation des assurés vers les réparateurs agréés semblerait encore plus pressante lorsque la gestion de sinistres automobiles est confiée par l’assureur à un prestataire extérieur qui lui aussi est rémunéré ;
- les assureurs sembleraient réticents à mettre en place la cession ou la délégation de créance au profit des réparateurs non agréés, ce qui permettrait à leurs clients d’éviter l’avance du paiement de la facture.
Parfois même l’orientation de l’assuré vers un réparateur agréé est assortie d’un discours péjoratif sur le réparateur habituel de l’assuré, ce qui est alors constitutif de concurrence déloyale. Des pressions trop systématiques sur les assurés pour les orienter vers les réparateurs agréés pourraient constituer des atteintes à la libre concurrence.
Des difficultés plus caractérisées affectent les pratiques commerciales dans le cadre de l’agrément lui-même.
* Au regard de l’article L. 442-6 du code de commerce, des difficultés portent sur les points suivants :
1. la remise ou ristourne accordée à l’assureur est fixée par un pourcentage unique sans tenir compte de l’apport réel de clientèle au carrossier ;
2. en l’absence d’accord entre l’assureur et le réparateur sur un nouveau tarif, pendant la durée de l’agrément : soit l’agrément est résilié par l’assureur, soit l’ancien tarif continue d’être appliqué et aboutit in fine à une résiliation ;
3.la pratique du préavis en cas de rupture est très disparate.
* L’application de l’article L. 441-3 du code de commerce semble imparfaite en ce qui concerne :
1. les services de mise à disposition de véhicule ;
2. les nouveaux services de prise en charge du véhicule au domicile ou au travail de l’assuré.
En effet, ils n’apparaissent pas sur la facture établie par le réparateur agréé à destination de l’assureur partenaire, à l’exception d’un seul assureur (mutuelle) de la place.
III Sur le processus suivi en vue d’améliorer les relations entre réparateurs et assureurs
En juin 2007, la CEPC a encouragé le rapporteur à faciliter la négociation d’un code de bonne conduite en rendant compte régulièrement à son Président.
Les assureurs (AXA, MAAF, MAIF, MACIF, MATMUT, GMF) leurs organisations (GEMA, FFSA) et les syndicats de réparateurs (FNAA, CNPA, GNCR) ont désigné des représentants ayant capacité ou délégation pour s’engager dans des discussions conclusives.
Les réunions des 12 juillet, 13 septembre 2007 et 13 décembre 2007 ont permis d’établir une charte qui est annexée au présent avis et qui devrait être prochainement ratifiée par les parties concernées.
IV Avis sur le projet de charte établi par les parties concernées
La Commission a engagé une concertation avec les représentants des carrossiers réparateurs et des assureurs, par l’intermédiaire de son rapporteur, M. le Professeur Luc Grynbaum, afin de formaliser des règles de bonne conduite dans le secteur professionnel considéré. Un projet de charte a été établi en conséquence. Cette charte propose des solutions à diverses difficultés observées dans les relations entre assureurs et carrossiers réparateurs. La Commission approuve les conclusions ainsi retenues, comme constituant un sensible progrès, à parfaire ultérieurement, et relève qu’elles seront opportunément mises en œuvre aux conditions suivantes :
- la charte concerne les réparateurs agrées ou non, l’assurance automobile obligatoire et les assurances automobiles de dommages facultatives ;
- la charte est applicable non seulement par les parties signataires, mais aussi par tout opérateur intervenant dans ce secteur d’activité et qui y adhère ; elle établit la référence des bons usages professionnels ;
1. les agréments seront soit négociés réparateur par réparateur, soit négociés par des mandataires reconnus par chacun d’eux, soit soumis à ratification a posteriori et adaptation au cas par cas ;
2. lorsqu’ils négocient des conditions préférentielles, les réparateurs et les assureurs prennent dûment en compte l’importance de leur relation.
Délibéré et adopté par la Commission d’examen des pratiques commerciales en ses séances plénières des 14 juin et 25 octobre 2007 et en sa séance en chambre d’examen du 7 février 2008, présidées par M. Pierre Leclercq.
Fait à Paris, le 7 février 2008
Le Président de la Commission
d’examen des pratiques commerciales
Pierre LECLERCQ