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Séparation des activités bancaires : les missiles sont à l'Ouest et les pacifistes sont à l'Est

Marie-Anne Barbat-Layani , Directrice générale de la Fédération Bancaire Française ( FBF)

Depuis la crise financière, de très nombreuses règlementations sont venues renforcer la solidité des banques. La banque d’aujourd’hui n’est plus celle d’avant la crise...La Fédération Bancaire Française ( FBF) a soutenu la plupart de ces réformes exigeantes, en particulier l'Union Bancaire, qui est une étape majeure de consolidation de la zone euro et de son secteur bancaire.

Curieusement, alors que l'arsenal règlementaire est aujourd'hui très complet, la Commission européenne a produit un nouveau projet de texte sur la séparation des activités bancaires, qui vise expressément à réduire la taille des banques européennes. A l'heure où des géants financiers se sont constitués aux Etats-Unis après la crise financière, l'Europe semble retomber dans ses vieux démons qui lui ont coûté si cher dans plusieurs secteurs industriels, où la Commission européenne a soigneusement veillé à empêcher la constitution de champions européens. Ce mythe européen du "small is beautiful" rappelle l'époque où les missiles étaient à l'Est et les pacifistes à l'Ouest...mais la perspective s'est inversée. L'Europe a besoin de banques solides et suffisamment puissantes pour financer les projets et les entreprises qui lui permettront de retrouver sa place légitime dans la compétition économique internationale, et le chemin de la croissance et de l'emploi.

C'est pourquoi la FBF, mais aussi et surtout le Gouverneur de la banque de France et les Parlements et gouvernements français et allemands, et les entreprises européennes, se sont vigoureusement élevés contre le projet de la Commission. Il est indispensable d’évaluer l’impact des règlementations sur le financement de l’économie avant toute nouvelle évolution, et notamment avant que le nouveau Parlement européen ne se saisisse du dossier de la structure des banques. Les réformes doivent laisser aux banques la capacité de financer le retour à la croissance via le crédit et les marchés.

La structure des banques a fait l’objet d’importantes réformes dans plusieurs Etats membres - Allemagne, Royaume-Uni, Belgique et France -, qui représentent 80% des activités des banques de financement et d’investissement en Europe. Dans ce contexte, le projet de règlement sur la séparation des activités présenté par la Commission européenne en janvier 2014 a créé une grande confusion, car il diffère profondément des législations nationales en cours de mise en œuvre, avec des conséquences très pénalisantes pour le financement des entreprises et de l’économie.

Préserver les outils de financement des entreprises tout en réformant l’organisation des banques a été l’un des critères qui a guidé les législateurs nationaux. La réglementation française détermine les activités qui ont vocation à être séparées structurellement, avec l’aide de paramètres spécifiques, et sous le contrôle étroit du superviseur. La Commission européenne devrait donc, comme elle le fait habituellement, examiner les législations nationales avant d'imposer un nouveau modèle.

Le projet européen est en effet bâti de manière totalement différente, puisqu’il ne préserve pas les activités de marché nécessaires au financement des entreprises comme la tenue de marché. Seule l’activité de tenue de marché des dettes souveraines est préservée, ce qui montre à quel point ce choix serait lourd de conséquences pour les entreprises ! Il remet en cause la possibilité pour les banques universelles européennes d’accompagner leurs clients entreprises sur les marchés, alors que les nouvelles règles prudentielles impliquent précisément un recours croissant au marché. Ce serait un contresens très dangereux.

Ce projet crée en outre des distorsions de concurrence au sein de l’Union européenne, puisque la dérogation aux exigences de séparation des activités qu'il prévoit pour les Etats membres, ne concernerait que le Royaume-Uni. Enfin, l’interdiction de mener des activités de gestion pour compte propre, qui va plus loin que la règle Volcker qui a inspiré les lois américaines, françaises et allemandes, et que le rapport Liikanen dont la Commission prétend s’inspirer, provoquerait un important transfert d’activités vers le"shadow banking". La stabilité financière en sortirait-elle renforcée ?