Contrôle des vins étrangers sans indication géographique (VSIG)

La DGCCRF a mené, en 2016 et 2017, une enquête de grande ampleur afin de vérifier l’étiquetage et la présentation de l’origine des vins importés, notamment d’Espagne.

©Phovoir

Ces contrôles ont été réalisés sur l’ensemble du territoire national et à toutes les étapes de la filière : producteurs, importateurs, négociants et distributeurs. Ce sont au total 179 établissements qui ont été contrôlés en 2016 et 564 en 2017, spécifiquement sur le sujet des vins étrangers. 22% des établissements visités en 2016 et 15% des établissements visités en 2017 faisaient l’objet de non-conformités allant de la présentation confusionnelle à la francisation, ce dernier cas étant un délit qui fait l’objet de suites pénales.

Contexte

Les producteurs français de vin sans indication géographique et de vin IGP font face depuis 2015 à une forte concurrence des vins espagnols sur le marché des vins d’entrée de gamme, notamment parmi les vins dits « de cépage ». Ces vins sont principalement importés par des négociants français pour être commercialisés en marques propres ou en marques distributeurs. Les alertes de la profession dénonçant des fraudes sur l’origine de ces vins ont amené la DGCCRF à diligenter dès 2016 une enquête spécifique, à l’échelle nationale. Cette enquête d’abord ciblée sur les importateurs de vin a ensuite été étendue à l’ensemble de la filière, jusqu’à la distribution, y compris le commerce de détail, et les cafés-hôtels-restaurants (CHR).

Contrôles de l’absence de francisation des vins importés

L’ensemble des principaux importateurs de vins, identifiés grâce aux données transmises par l’administration des Douanes, ont été contrôlés.

Ces contrôles ont porté en premier lieu sur la traçabilité des vins importés d’Espagne : les enquêteurs ont vérifié que ces vins n’étaient pas « francisés », c’est à dire revendus en tant que « Vin de France ».

L’enquête a montré que ces vins sont très majoritairement commercialisés avec la bonne mention d’origine, « Vin d’Espagne » par exemple, ou sous la mention « Vin de la communauté européenne » (VCE) lorsqu’ils sont assemblés avec des vins provenant d’autres pays de l’Union européenne.

Cependant, plusieurs cas de francisation concernant des volumes allant de 2 000 hl à 34 500 hl (soit l’équivalent de 4,6 millions de bouteilles) ont été constatés. Des vins espagnols étaient ainsi revendus en vrac en tant que « vin de France » voire en usurpant un nom d’IGP française. Ces fraudes font l’objet de procédures pénales pour tromperie, pratique commerciale trompeuse (PCT), tromperie en bande organisée ou encore usurpation de signes de qualité. Les peines encourues en matière de PCT sont de 2 ans de prison et 300 000 euros d’amende, ce montant pouvant être porté à 10 % du chiffre d'affaires moyen annuel, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement.

Des manquements ont également été observés concernant le libellé de la dénomination de vente sur les factures, celui-ci étant parfois imprécis avec pour possible conséquence des mentions d’origine erronées au stade de la commercialisation, notamment à l’étranger lorsque ces vins sont réexportés.

Contrôles de l’étiquetage des vins importés

Ces contrôles ont été menés tant auprès des opérateurs de la production responsables de l’étiquetage des vins qu’au stade de la distribution par des constatations directes dans les « rayon vins ». Plus de 1000 établissements de commerce de détail ont été contrôlés.

Les enquêteurs ont vérifié que les étiquetages des vins importés (mentions d’origine, logo, dessins, etc…) ne laissaient pas supposer que ces vins avaient été produits en France.

Plusieurs cas de non-conformité ont été constatés. Les anomalies les plus fréquemment rencontrées sont :

  • Une visibilité insuffisante de la mention d’origine. La mention d’origine est une mention obligatoire devant figurer de façon visible et lisible sur les vins. Or, par exemple, pour des vins vendus en Bag-in-Box (BIB), la mention d’origine figurait dans certains cas uniquement sous le BIB ou sous la poignée et n’était donc pas directement visible par le consommateur.
  • Des cas de pratiques commerciales trompeuses. Sur plusieurs étiquetages de vins étrangers, les mentions et les illustrations employées pouvaient induire le consommateur en erreur quant à l’origine du vin. Par exemple, une fleur de lys, une cocarde française, la mention « Produced in France » ou encore la mention « Embouteillé en France » étaient mises en avant alors que la mention d’origine « Vin d’Espagne » ou « Vin de la communauté européenne » figurait au dos de la bouteille et de façon peu lisible. En outre, certains étiquetages utilisaient des éléments graphiques évoquant une exploitation viticole, par exemple l’image d’un château, alors que le vin était issu d’assemblages.

Ces anomalies ont donné lieu à 25 procès-verbaux dressés à l’encontre de distributeurs pour des faits relevant de la pratique commerciale trompeuse, transmis aux juridictions compétentes et passibles des sanctions précisées au point précédent.

En outre, des mesures de police administrative, notamment des injonctions de destruction de lots d’étiquettes, de remise en conformité d’étiquetages et de retrait de la vente, ont été prises. Un magasin a ainsi retiré de ses rayons 16 700 bouteilles d’un vin espagnol  qui pouvait induire le consommateur en erreur sur sa provenance, celle-ci n’étant pas clairement indiquée. Des lots de vins destinés à l’export ont également été bloqués, les attestations de conformité pour l’exportation ayant été refusées.

Présentation des vins en linéaire : des anomalies relevées sur les étiquettes de prix et l’agencement des rayons

Lorsque le rangement des produits n’est pas en cohérence avec les libellés des rayons, ces présentations de vente sont confusionnelles pour les consommateurs et peuvent relever de la pratique commerciale trompeuse.

A titre d’exemple, les enquêteurs ont relevé dans un rayon portant l’intitulé « vin de pays » (réservé aux vins bénéficiant d’une indication géographique protégée - IGP) la mise en vente de près de 40% de vins de France, étrangers ou de la Communauté européenne ne bénéficiant pas d’une indication géographique. Ils ont également constaté le mélange de vins français et étrangers dans des linéaires alors que le rayon vins comportait un rayon « vins étrangers ».

Les enquêteurs se sont également attachés à contrôler les dénominations de vente utilisées sur les étiquettes de prix en rayon. Des anomalies ont été détectées dans plusieurs enseignes : les étiquettes de prix de vins étrangers ou de VCE mentionnaient une origine française (par exemple : « VDF » ou « IGP OC »). Ces cas sont rencontrés principalement lorsque l’approvisionnement d’une marque de vin auparavant élaborée avec du vin français a été modifié au profit de vins étrangers ou VCE. Ces anomalies, qui proviennent d’erreurs au niveau du référencement des produits, sont en outre susceptibles d’engendrer des erreurs importantes dans les données des baromètres de consommation auxquelles les interprofessions vitivinicoles ont recours.

Des pratiques commerciales trompeuses sur des vins commercialisés dans les cafés, hôtels et restaurants (CHR)

L’enquête a été étendue au stade des cafés, hôtels et restaurants pour vérifier notamment l’origine des vins vendus au pichet ou au verre. Ce sont 2 414 établissements qui ont été contrôlés.

Les enquêteurs ont constaté deux types de non-conformité :

  • l’absence de mention d’origine du vin sur la carte des vins alors que la confusion est entretenue par l’utilisation de dénominations commerciales à consonance française (ex : « cuvée du patron ») ou par l’environnement de vente.
  • Des francisations volontaires de l’origine. Un restaurateur commercialisait par exemple du vin au pichet vendu comme « Vin IGP OC » alors qu’il s’agissait de vin d’Espagne.

Des injonctions de mise en conformité des « cartes des vins » ont été adressées aux opérateurs concernés et des procès-verbaux pour pratiques commerciales trompeuses ont été dressés.

Les prélèvements

28 échantillons ont d’ores et déjà été analysés dans le cadre de ces enquêtes. Ces contrôles analytiques permettent :

  • de contrôler la mention du cépage pour certains vins mono-cépages ;
  • de vérifier l’origine et le millésime des vins par rapport à la banque de données isotopiques de référence ;
  • d’analyser les résidus de pesticides, notamment pour détecter une origine extra-communautaire caractérisée par la présence de pesticides interdits dans l’Union européenne.

Ces analyses n’ont pas mis en évidence de non-conformité liée à l’origine des vins.

Cette enquête concernait à la fois la protection des consommateurs, afin qu’ils disposent d’une information loyale leur permettant d’orienter leurs choix de manière suffisamment éclairée, et la protection des professionnels des filières vitivinicoles contre des pratiques frauduleuses. Celles-ci peuvent avoir des répercussions négatives importantes et des conséquences économiques significatives.

Les contrôles ont montré que la réglementation était correctement appliquée dans la majorité des cas. Des manquements graves ont cependant été relevés, pouvant porter sur de grands volumes.

Ces résultats justifient les mesures prises par la DGCCRF, en particulier l’engagement de suites pénales, et le maintien de son attention sur le secteur à l’avenir.

Infographie